Villa Lobos - Floresta do Amazonas - un chant de la terre !


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Chagall








Quel art peut-il concurrencer la musique ? Nul besoin de traduction, d’apprentissage, de connaissance, la musique, art universel, parle directement à l’instinct, à nos passions, à nos rêves, à notre sensibilité, c’est le regard de l’inconscient sur le monde visible et invisible, la force et l’énergie même de l’univers.

Depuis que les compositeurs se sont lentement détachés du sacré pour investir la luxuriance de la terre profane, en proposant d’ailleurs une autre approche de la sacralité, des œuvres musicales majeures sont devenus des phares et des repères incontournables accompagnant les changements profonds de nos sociétés.


A la fin du XIX°s. comme au début du XX°s. les plus grands compositeurs ont changé la musique de façon décisive, pressentant les bouleversements inouïs qui allaient avoir lieu ! Il y a eu d’un côté une soif de lumière et d’élévation rarement atteinte et de l’autre une peinture tragique et bouleversante de notre monde, le tout délivré dans un espoir sans faille insufflé par ces génies de la musique à leur auditoire subjugué : tels Malher (1888-1910), Prokofiev (1891-1953), et Chostakovitch (1906-1975).



Stravinski a senti que la vieille Europe se fissurait de toutes parts et qu’il allait y avoir l’émergence d’un renouveau extraordinaire, d’un « printemps » à nul autre pareil. D’ailleurs, en illustrant « Le sacre du printemps » dans le film d’animation « Fantasia », Walt Disney imagine la création du monde jusqu’à la disparition des dinosaures et l’approche d’une ère nouvelle, le tout sous la direction de Léopold Stokowski. Et c’est tout à fait ce que l’on ressent à l’écoute de cette œuvre de Stravinski : la cassure quasiment tellurique entre le passé et un présent en gestation !


Cette « cassure » est intervenue a de multiples occasions durant tout le XX°s.après les deux guerres mondiales, après les années cinquante et l’émergence d’une société de consommation touchant toutes les couches de la société, après mai 68, après la chute du mur de Berlin etc.



Si le poème symphonique « Le sacre du printemps », ayant initialement servi de musique de ballet (ballets russes de Diaghilev), reste une des œuvres les plus marquantes à ce niveau, il ne faudrait pas oublier néanmoins toutes celles qui ont annoncé ce bouleversement fondamental en donnant la vision d’une liberté presque sauvage ou trop longtemps muselée dans les filets de mille contraintes sociétales.


Des œuvres majeures de la fin du XIX°s et du début du XX°s ont porté ce besoin d’évasion hors de nos limites et loin de toutes formes de contraintes, c’est une volonté de goûter à un âge d’or et à une beauté mythique, avec, parmi les exemples les plus fameux et les plus divers :


-DEBUSSY : Prélude à l’après-midi d’un faune – création 22/12/1894
-SHÖNBERG : La nuit transfigurée - id 18/03/1902
-RAVEL : Daphnis et Chloé - id 08/06/1912
-ORFF : Carmina Burana - id 08/06/1937
-STRAUSS : Les 4 derniers lieder - (écrits vers 1948) id 22/05/1950
-BERNSTEIN : West Side Story – id 26/09/1957
-VILLA LOBOS : Floresta do Amazonas - 1958


Le plus mal connu reste Heitor VILLA LOBOS, compositeur brésilien (1897-1959), dont chacun connaît les célèbres vocalises des Bacchianas Brasileiras, mais pas grand-chose en dehors de cela ! Musique de chambre, concertos, symphonies, opéras, ce touche à tout de génie a laissé une œuvre importante, riche et colorée comme le Brésil. Avec «Floresta do Amazonas», qui est sans doute son dernier grand poème symphonique croisé d’oratorio, il utilise la langue des indiens pour ses chœurs d’homme et les poèmes de Dora Vasconcelos, chantés par une soprano, à divers moments du déroulement de cette œuvre fleuve.

C’est un enchantement, d’une grande beauté, d’une force intense et d’une rare délicatesse, pouvant rappeler également son attachement à la musique française qu’il a popularisée dans son pays ; de plus il aimait la France et Paris où il a donné de nombreux concerts dans les années cinquante. Villa Lobos a également étudié la musique à Paris dans sa jeunesse.


Initialement cette musique devait être celle d’un film américain, mais le compositeur, certainement plus poète qu’homme d’affaires, avait cru que sa partition serait utilisée sans coupure ni réaménagement. L’image devant servir sa musique et non l’inverse. C’était méconnaître Hollywood et la MGM qui demanda à un autre musicien, Bronislaw Kaper, de l’adapter pour les besoins cinématographiques et quelque part de la dénaturer aussi. Il s’agit du film «Green Mansions» de Mel Ferrer, tiré du roman de WH Hudson qui raconte l’histoire d’une femme, Rima, vivant dans la jungle. «Floresta do Amazonas» existe donc en deux versions : le long poème véritable et intact créé par Villa Lobos et un ersatz hollywoodien.

Cette forêt amazonienne se découvre comme un Eldorado : vie primitive et authentique, somptuosité d’une création originelle, délivrance d’un message d’une touchante pureté ! Les lignes mélodiques de Villa Lobos coulent et nous emportent dans leur rêve, et c’est un retour aux sources riche d’exaltation et de bien être.


Cette œuvre méconnue doit faire partie d’urgence de vos découvertes !















1 commentaire:

  1. Merci beaucoup, toutes ces références sont très riches et évocatrices.
    Nous aimons énormément ce " Floresta do Amazonas" de Villa Lobos; comment en trouver la partition ? Aucune requête Internet de donne de réponse.Merci d'avance.

    Emmanuel ( chanteur)
    emten03@yahoo.fr

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